mercredi 3 mars 2010

Inondations : et nous ?

Quand les digues cèdent sur le littoral, l'eau remonte jusqu'à Saint-Omer

Une digue qui lâche, des maisons construites sous le niveau de la mer, des zones inondables...
Les terribles événements survenus en Vendée ce week-end sont là pour nous rappeler que les terres situées dans le delta de l'Aa (entre Calais et Newport, au départ de Watten) dépendent également de digues naturelles. Et du travail de l'homme.


(...) Au IVe siècle, ce delta était, comme le montre la reproduction ci-dessus, en partie submergée. Il a fallu de nombreux travaux pour assécher les terres. Jusqu'à nos jours. Mais l'histoire est là, aussi, pour témoigner de la fragilité de cette protection. Gilles Pelletier, féru d'histoire, a retrouvé deux faits marquants dans les archives.

Le 2 janvier 1767, les terres de Sangatte sont inondées par l'eau de la mer qui crève la digue. Cette digue avait été construite en 1599, par les soins de Dominique de Vic, gouverneur de Calais.

Le 31 janvier 1953, un ouragan s'abat sur le Calaisis. C'est au lieu-dit Maison-Blanche près de Oye-Plage que la première digue cède sous les assauts de la mer qui recouvre 23 hectares de terre. Une autre brèche de 15 mètres de large est ouverte entre Blériot-Plage et Sangatte, la route nationale et les champs sont submergés par 40 centimètres d'eau de mer. Il y a urgence car la rupture de la digue pourrait provoquer une inondation jusqu'à Saint-Omer. De gros moyens de consolidation sont mis en oeuvre par la mairie de Calais, les ponts et chaussées et la chambre de Commerce. Malheureusement une des deux constructions provisoires ne résiste pas aux coups de boutoir de la marée suivante qui inonde cette fois 200 hectares du côté de Oye-Plage. Ces trois jours de tempête ne firent aucune victime sur le littoral. •
in LA VOIX DU NORD, édition de Saint-Omer du 26 février 2010
* * *
Les wateringues : une histoire d'eau qui remonte au XIIe siècle mais qui est toujours d'actualité
Le terme de wateringues ne dit pas grand-chose aux gens quand on s'éloigne du triangle composé par Calais, Dunkerque et Saint-Omer. De manière générale, on connaît mieux le terme de polder, une technique fort pratiquée au Pays-Bas qui consiste à assécher des terres. Wateringues vient de la contraction et de la francisation des mots hollandais «water» et «ring». Le premier signifie «eau», le second «cercle». On peut traduire wateringue par cercle d'eau, un terme qui désigne autant le fossé qui entoure une propriété que le regroupement de gens concernés par l'eau.

Les Romains ne se sont jamais intéressés à cette zone où les limites entre la terre et la mer n'étaient pas nettes. Au fil du temps, on laisse des gens s'y installer, à leurs risques et périls. En contrepartie, ils deviennent propriétaires. C'est au XIIe siècle qu'un comte de Flandre, Philippe d'Alsace, estime qu'il faut réglementer les pratiques. En effet, en laissant chacun faire ce qu'il veut, ses travaux peuvent s'avérer néfastes pour ses voisins.

À la Révolution, l'État, dans sa volonté centralisatrice, décide de s'occuper des wateringues. Mais, devant la particularité et la complexité de ce système, il choisit d'en redonner la compétence aux conseils généraux. Beaucoup de textes réglementant les wateringues remontent à l'époque napoléonienne.

Le Nord et le Pas-de-Calais comptent 13 sections de wateringues. Sur les huit du Pas-de-Calais, deux ne figurent pas dans le delta de l'Aa. La première concerne le bassin de la Slack, de la région de Marquise à celle d'Ambleteuse. La seconde, au nom poétique de ruisseau des Anguilles, se situe à proximité de Tardinghen, entre les caps Blanc-Nez et Gris-Nez.

Dans les cinq sections du Nord, celle des Moëres, entre Hondschoote et Bray-Dunes, présente la particularité d'avoir été un lac asséché à une époque par un ingénieur hollandais, Wenceslas Cobergher. Ce secteur se trouve bien en dessous du niveau de la mer (jusqu'à - 2,50 m).

Maintenant que les terres situées dans le triangle Calais - Saint-Omer - Dunkerque ne portent plus vraiment les traces de leur passé, on comprend que certains critiquent la fiscalité des wateringues. Pour mener à bien l'entretien et la construction de fossés, digues, stations de pompage, les sections de wateringues perçoivent un impôt proportionnel à la surface des terrains situés dans leur périmètre historique. Même si, au fil du temps, suite à certaines interventions et pressions, la limite entre ceux qui paient et les autres a pu évoluer.

Rien ne dit que de nouveaux critères ne pourraient pas entrer en ligne de compte. Le système a en effet été conçu à une époque où il y avait moins de constructions qu'actuellement. On pourrait intégrer par exemple la valeur du bien protégé par l'action des wateringues. Ou encore pénaliser les constructions qui imperméabilisent les sols et accélèrent l'arrivée des eaux de pluies dans les zones des wateringues. •
JEAN MARC SZUBA
in LA VOIX DU NORD, édition de Calais du 29 décembre 2009

1 commentaire:

Cardon Jean Marc a dit…

Parlez-nous des transgressions dunkerquiennes ou flandriennes...
Quand la région est devenue comme l'Atlantide (ou plutôt la ville d'YS). Et que les pirates saxons sont venus s'installer dans la région de Boulogne...