vendredi 18 novembre 2005

La naissance du drapeau blanc

Le drapeau blanc, que tout le monde associe à la trêve ou à la reddition, est né en 1708.

La ville de Lille, enserrée dans les remparts de Vauban, protégée sur son front nord par la citadelle qui connaît enfin l’épreuve du feu en 1708. Vauban l’avait voulu imprenable, elle ne tomba jamais mais la difficulté d’être cerné par des ennemis supérieurs en nombre, de se voir privé de ravitaillement en vivres, en poudres, en hommes oblige au terme d’une résistance acharnée de faire le choix de se rendre ou de se sacrifier jusqu’au dernier.

Si la ville, après d’intenses bombardements, capitule devant Marlbourough et le Prince Eugène de Savoie, le siège n’en est pas terminé pour autant. Selon les termes de la reddition, le Maréchal Boufflers obtient de s’enfermer dans la citadelle avec ses hommes. Revenu de Versailles dès le début des combats, il assume dignement sa charge, sachant que Louis XIV, bousculé par les coalisés ne pourra très certainement pas venir à son secours.

Un seul ordre : tenir!

La citadelle, Vauban l’avait voulu inexpugnable… Tout devait concourir à sa défense. Parfaitement dessinée, pourvue d’un canal souterrain pour alimenter le moulin, couverte d’arbres pour le chauffage et la préparation des palissades qui complètent les défenses, autant que pour fabriquer des fascines, le seul défaut que l’on peut y trouver est la faiblesse relative des capacités de stockage de sa poudrière… La nature elle-même, forcée par Vauban, vient encore renforcer la position française car Boufflers a ordonné de tendre l’inondation des alentours. Ce ne sont pas les 50 cm d’eau recouvrant les 17.000 hectares prévus par le constructeur, suite à un malheureux concours de circonstances mais cela suffit à gêner les coalisés. Le siège n’est que combats incessants : coups de mains contre les sapeurs, canonnades et embuscades. Le Régiment du Royal des Vaisseaux se défend avec ardeur : les assiégeants mettent 23 jours à prendre l’avant-chemin couvert, là où Vauban prévoyait qu’il ne tombe qu’au bout d’une décade.

Le siège entamé le 25 octobre 1708 ne prend fin que sur ordre du Roi qui avise Boufflers par lettre de ne remettre la citadelle qu’au moment où la tenir deviendrait réellement impossible.

Avec des hommes épuisés par les combats et la faim, blessés et malades en trop grand nombre, après avoir utilisé toutes ses munitions, Boufflers se résigne à faire battre la chamade le 8 décembre.

Ainsi que le prévoit la tradition, le régiment de Touraine hisse le drapeau blanc de sa compagnie colonelle sur le bastion du Roi car le privilège de demander l’arrêt des combats est accordé à la plus vieille formation présente dans les murs. La citadelle ne tombe pas, elle se rend, comme le prévoyait Vauban.

Cette capitulation n’est pas honteuse, au contraire elle est chargée de gloire car la pugnacité de Boufflers sauve la France et le Roi momentanément. Pour avoir gardé si longtemps les coalisés à Lille, leur barrant la route de Paris et les retardant assez pour l’hiver les empêche de reprendre leur progression, permettant aux Français de reconstituer leurs forces. L’action est tellement considérable que la citadelle de Lille porte, inscrit au fronton son nom : quartier Boufflers.

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