mercredi 7 avril 2010

7.000 morts dans les tranchées

À La Couture, un mémorial érigé en 1928 rappelle le sacrifice des militaires portugais.
PHOTO ÉMILIE DENIS



C'est un aspect peu connu de la Grande Guerre. Cinquante-cinq mille soldats portugais ont combattu sur notre sol. Entre sept et huit mille y ont perdu la vie, pour la plupart en avril 1918 dans la bataille de la Lys. Leurs compagnons d'armes ont libéré Lille aux côtés des militaires britanniques.

Entre Béthune et Estaires, sur un chemin de mémoire, deux sites rappellent le sacrifice des soldats portugais. Tout d'abord le cimetière militaire de Richebourg où sont regroupés près de deux mille corps depuis 1924. Ensuite, à quelques kilomètres de là, le mémorial de La Couture, également baptisé «Christ des tranchées» inauguré solennellement dix ans après l'armistice, le 10 novembre 1928.

Corps expéditionnaire de 55 000 soldats
L'engagement de la jeune république portugaise dans la guerre date de 1916. Un traité d'entraide lie de longue date l'État portugais à une autre puissance maritime, l'Angleterre. Après le feu vert britannique, le Portugal envoie outre-Manche ses officiers et forme sur son sol un corps expéditionnaire de 55 000 soldats. Les militaires naviguent ensuite jusqu'à Brest (la Manche, sous contrôle des bâtiments allemands, est trop dangereuse) avant de terminer le trajet vers la ligne de front en train... ou à pied. L'état-major portugais s'installe au manoir de la Peylouse. Les soldats portugais ne dépendent pas de l'armée française mais sont rattachés au corps expéditionnaire britannique.

Entre-temps, en 1917, un coup d'État se produit au Portugal et le nouveau chef d'État se préoccupe peu de ses troupes envoyées en France. Les soldats ne seront jamais relevés. Après un an de présence sur le front, ils sont au bord de l'épuisement. À la veille de la bataille de la Lys, engagée par les Allemands pour tenter de reprendre Ypres, la moitié des soldats portugais sont mis au repos vers Thérouanne.

Quand les Allemands déclenchent l'offensive le 9 avril 1918, la ligne de front recule jusqu'à Saint-Venant. Les villes d'Estaires et de Merville sont détruites à cent pour cent. Plusieurs semaines d'une bataille acharnée permettront aux troupes britanniques puis portugaises de regagner le terrain perdu.

La seconde division portugaise commandée par le général Gomes da Costa (qui deviendra plus tard président du Portugal) dispose de 20 000 hommes face aux 50 000 soldats de la VIe armée allemande. Dans les combats, le corps expéditionnaire portugais perd environ 300 officiers et 7.000 hommes de troupe.

Première vague
Tous les survivants ne rentreront pas au pays natal à l'issue du conflit. On estime à plusieurs centaines ceux qui restèrent en Flandre et dans l'Audomarois pour y entamer une nouvelle vie. Près d'un demi-siècle avant celle, massive, des années soixante, la première vague de l'immigration portugaise dans la région est une conséquence inattendue de la Première Guerre mondiale.
D. S
in LA VOIX DU NORD, édition régionale du 7 avril 2010

1 commentaire:

Anonyme a dit…

C'est bien d'évoquer le courage de ces gens.J'avoue ignorer complétement cette histoire, jusqu'à ce jour !
Jean Marc cardon