jeudi 11 février 2010

Mouchotte et Dunkerque


La base aérienne 103 va fermer, l'escadron Picardie a été dissous et les Tigres ne vont pas tarder à quitter le ciel de la région... Il faut cependant jeter un oeil sur la vie exemplaire du parrain de la base cambraisienne...



Premier français à commander un squadron (escadron) de la Royal Air Force (R.A.F.), René Mouchotte (1914-1943) a un parcours est exemplaire. Il s’échappe d’Oran pour rejoindre de Gaulle à Londres. Il se distingue rapidement : en septembre 1942, il reçoit la Distinguished Flying Cross et on lui confie le commandement du 65e Squadron (de la R.A.F.) puis celui du Squadron 341 « Alsace » (des Forces Aériennes Françaises libres) à peine déclaré apte au combat en mars 1943. Excellent pilote, il permet même au à la base de Biggin Hill d’inscrire sa 1000e victoire.

des cadences infernales
En deux ans, les épreuves ont été rudes: « J’ai un besoin hurlant de repos » notait-il alors dans ses carnets. Il lui est impossible de prendre huit jours de permission. Les missions de succèdent et elles sont loin d’être des balades… C’est donc un homme aux limites de la résistance qui décolle le 26 août 1943 pour une mission sur le secteur de Saint-Omer dont il ne reviendra pas. Avant de disparaître, il eut à plusieurs occasions de s’intéresser à Dunkerque dont on trouve mention dans ses carnets.


Le 4 janvier 1941, il enrage de ne pouvoir se joindre aux chasseurs-bombardiers Mosquito qui opèrent sur Coudekerque-Branche et ses environs et ne peut que suivre leurs évolutions par radio. De belles occasions ne manquent pas de se présenter par la suite. Le 25 septembre, en mission vers Ostende, distante de sa base d’une vingtaine de minutes de vol au ras des vagues, il aperçoit un bateau de 2.000 tonnes à cent mètres des jetées du port dunkerquois. L’attaque est fulgurante et dévastatrice malgré les batteries côtières disposées de part et d’autre du chenal. Le navire ennemi est fortement endommagé. Le lendemain, suivant la côte depuis Calais, toujours au plus près des vagues, il perçoit entre Dunkerque et Ostende la silhouette de six gros navires. Malheureusement, ils sont vite dépassés. Malgré ses manœuvres, il ne peut en attaquer qu’un seul, sans grand succès.

Un ennemi aux abonnés absents sur le littoral
Le 16 octobre 1941, le dépit supplante la colère car il n’y a aucune activité navale entre Dunkerque et Ostende. Les proies se font rares. Ce n’est pas que les Britanniques aient enfin la maîtrise du ciel mais les appareils allemands volent alors rarement au-dessus de nos côtes. Mouchotte et ses équipiers en profitent : le 20 avril 1942, il se permettent même de mener un exercice dans le ciel de la cité de Jean Bart, il n’y a ni bateaux, ni avions ennemis en vue ! Le vol se transforme en véritable promenade jusqu’au Touquet. Le 8 octobre, ses avions escortent des bombardiers qui doivent écraser sous un tapis de bombes les usines et les triages de la région lilloise. La mission se limite entre Gravelines et Calais à une altitude élevée : 28.000 pieds (à peu près 9300 mètres). Là encore, aucune résistance. C’est pourtant une mission atypique car il y a pléthore d’occasions de faire montre d’un réel talent de pilote de chasse au-dessus du sol anglais comme du territoire français sont

Disparu en mission
Sa carrière pourtant s’arrête tragiquement dans le ciel du Nord. Toujours en mission, son avion le mène le 26 août 1943 sur le secteur de Saint-Omer, très vraisemblablement sur Eperlecques et la forêt de Watten. L’on perd sa trace, la Manche est à quelques minutes de vol mais il ne rejoint pas l’Albion… Sa disparition est brutale. L’on pense qu’on ne trouvera jamais sa dépouille. Pourtant la mer la rejette sur la plage de Middelkerke, où il rejoint le carré des braves. La ville le fit citoyen d’honneur à titre posthume après la guerre (une place porte même son nom). Il totalisait alors 1.748 heures de vols dont 408 en 382 missions de guerre.
Enterré sous une fausse identité (car les pilotes de la France Libre craignaient des représailles contre leurs familles), l’oubli d’une étiquette à son nom trahit sa réelle identité. Après enquête à la Libération, son corps ne retrouve le sol natal qu’en 1949. Son souvenir reste attaché à la région : la base de chasse de Cambrai (Base Aérienne 103) porte son nom depuis sa création en 1953, parrain choisi par son premier commandant le colonel Pelleray , qui avait été compagnon d’armes de Mouchotte. En fait, Mouchotte, c’est le Guynemer des pilotes de 40…

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