mercredi 23 décembre 2009

le tombeur de Frisius

Né en 1895, ainé de six enfants, le jeune Aloïs Liska est alors sujet de l’Empire austro-hongrois et c’est sous cet uniforme qu’il se bat en 1915 sur le front russe mais est fait prisonnier en 1916. L’année suivante, alors que la Russie connaît les affres des Révolutions, il s’engage dans les Légions Tchécoslovaques en Russie. Affecté dans l’artillerie, il attend 1920 pour rentrer chez lui, dans un nouveau pays car les traités de paix ont donné naissance - en autres - à la Tchécoslovaquie en réduisant l’Autriche-Hongrie à sa plus simple expression. La carrière aurait pu être tranquille en s’engageant comme officier au 51e Régiment d’artillerie à Stara Boleslav, régiment qu’il finit par commander quelques années plus tard.



Et la guerre arriva…
La guerre le mène en France où il commande le 1er régiment d’artillerie tchécoslovaque mais le rouleau compresseur allemand l’oblige à être évacué au Royaume-Uni pour continuer le combat. En 1943, il passe au grade de Brigadier Général et se voit confier le commandement de la Brigade Tchécoslovaque Indépendante qu’il s’emploie à transformer en 1ère Brigade blindée tchécoslovaque dont les hommes, de retour d’Afrique, sont rompus au combat. Les ordres comme son envie sont clairs : participer à la chute du IIIe Reich coûte que coûte au côté des Alliés et des exilés comme les Polonais ou les Français Libres… Août 1944, il faut faire mouvement sur la France. Débarqués au port artificiel d’Arromanches, mis en place après le débarquement, la brigade est intégrée au dispositif canadien et participe à la prise de Falaise, la ville de Guillaume le Conquérant…

En octobre, une nouvelle feuille de route tombe : direction la poche de Dunkerque où s’est retranchée une garnison allemande. Les Alliés ont renoncé à prendre le port ruiné autant par les bombardements depuis 1940 que par les sabotages de l’occupant. Devenue inutile, il faut juste empêcher Frisius d’en sortir. Première mission en s’installant à Armbouts-Cappel et à Spycker : harceler les assiégés et les empêchant de consolider leurs défenses.

Ses moyens sont importants. La « Czekoslovak Independant Armoured Brigade Group » est forte de trois régiments de chars, d’un bataillon d’infanterie portée, d’artillerie de campagne, antichars et anti-aérienne ainsi que d’éléments du Génie. Mieux, ses 4.260 hommes sont rejoints dès la trêve d’octobre conclue avec l’Amiral Frisius par le millier d’hommes du Bataillon Jean Bart du commandant Dewulf permettant de reconstituer le 110e RI.

Vae Victis
Le 8 mai 1945, près avoir pris contact avec le nouveau Führer, l’Amiral Dönitz, Frisius arrive finalement au QG du général Liska à Wormhout le lendemain de la reddition de Berlin. Il est convenu que la garnison allemande capitule à 16 heures et entame son désarmement le lendemain au moment où Liska entre à l’Hôtel de ville de Dunkerque. Mission est terminée, le 12 mai, il faut se résoudre à quitter Dunkerque pour rentrer au pays. En six jours d’un périple à travers une Allemagne dévastée, ses hommes retrouvent avec lui la terre natale. Le général Liska y retrouve sa femme et sa fille rescapées des camps de concentration mais son fils n’a pas survécu aux marches de la mort imposées aux prisonniers face à l’avancée des Alliés.
Le Président Benès le nomme alors directeur du Collège Militaire de Prague mais le Coup de Prague en 1948 le jette sur les chemins de l’exil. Les Communistes, sur ordre de Staline, prennent le pouvoir et procèdent à des purges comme en URSS. Premiers visés dans l’armée, les officiers qui ont servi en Angleterre. Contraint à la démission, il quitte alors sa patrie pour Londres et finalement, décède en 1977, à Putney, dans la banlieue de la capitale britannique. Pratiquement oublié de ses compatriotes, le général ne recevra l’hommage de sa Nation qu’en 1991, après la chute du Bloc de l’Est… A Dunkerque, son nom reste associé à l’épopée de la cité de Jean Bart, un nom qui évoque les années terribles et pourtant porteur d’espoir des années de paix retrouvées…

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