dimanche 18 octobre 2009

«Pour apprendre le flamand, il faut que ça vibre quelque part»

De Bergues où elle est née à Dunkerque où elle vit, Marie-Christine Lambrecht reste fidèle à la Flandre.

«Pour apprendre le flamand, il faut que ça vibre quelque part.» Et depuis cinquante-neuf ans, «ça vibre» chez Marie-Christine Lambrecht, elle qui donne des cours de flamand, préside l'association culturelle Het Reuzekoor (le choeur du géant) et assure la vice-présidence de l'Institut de la langue régionale flamande (Akademie voor Nuuze Vlaemsche Taele).
PAR LAURENT LEYS
PHOTO JEAN-CHARLES BAYON

Ça a même commencé dès le berceau, dans la maison familiale de Bergues. «Mes parents parlaient cette langue pour évoquer des choses graves ou tristes. Je l'ai apprise en les entendant. Je leur répondais en flamand, ce qui les étonnait. Ils me disaient : "Ce n'est pas bien de parler flamand. Il faut que tu réussisses dans tes études, que tu t'intègres, que tu ne sois pas différente des autres". Or, je travaillais très bien à l'école.» La jeune Marie-Christine en tire la conclusion que la langue de ses aïeux ne nuit pas à l'apprentissage. «J'ai passé une licence d'anglais pour entrer dans l'enseignement comme maître auxiliaire. J'ai donné des cours, essentiellement à l'oral, à Cappelle-la-Grande, Wormhout et Bourbourg
De son passage à Wormhout, elle garde un bon souvenir. Moins agréables, en revanche, ses expériences à Cappelle et à Bourbourg : «J'enseignais toutes les matières à des élèves de la sixième à la troisième, dans des classes difficiles et de faible niveau.» Un grave accident de la route en novembre 1973, suivi d'une démission quelques mois plus tard, met fin à sa carrière d'enseignante. Direction l'ANPE où là - coup de chance - «le responsable de l'agence était un ancien professeur de droit de mon lycée». «Il m'a dit : " On va dans mon bureau pour causer. Ça ne t'intéresse pas de travailler à l'ANPE ?". Je me suis fait expliquer le métier et comme j'avais des connaissances en langues (y compris l'allemand, appris à l'école), je suis entrée facilement, au bas de l'échelle.» Trente-sept ans plus tard, elle travaille toujours au Pôle emploi de Dunkerque.

Ses soirées, ses week-ends, cette femme déterminée - il suffit de la voir agiter la main pour ponctuer ses propos - les passe souvent à militer pour la défense de la culture flamande. Elle s'anime à évoquer les écoles où on enseigne la langue, à Esquelbecq, Noordpeene, Volckerinckhove et Wormhout. «Ce sont des cours optionnels sur la base du volontariat, deux fois trente minutes par semaine. Vous verriez comment ces enfants de CE2, CM1 et CM2 - plus d'une centaine au total - sont avides d'apprendre!» Elle espère que sera acceptée la demande de trois autres écoles, à Lederzeele, Broxeele et Drincham.

Pour sa part, elle s'adresse à des adultes de tous les niveaux dans des «vlaemsche lessen», à Bergues. Elle met l'accent sur l'oral. «La langue du coeur», comme elle l'appelle, passe avant tout par l'oreille.
Aujourd'hui, à Bollezeele, elle participe au cinquième Festival de la langue et de la musique flamandes. Si vous engagez la conversation, ne comptez pas votre temps : qu'elle parle en français ou en flamand, Marie-Christine Lambrecht a cinquante-neuf ans de passion à faire partager. •

in LA VOIX DU NORD, édition de Dunkerque, 18 octobre 2009

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