mardi 7 octobre 2008

Du mois d'octobre 2008

Dixième mois de l’année malgré son étymologie, octobre est le mois des vendanges tardives de la récolte des pommes à cidre et des glands et finira avec la récolte des courges, un des derniers légumes avant l’hiver, que l’on a facilement rapproché d’halloween. C’est le mois du grand déclin végétal. Les nuits sont de plus en plus précoces et le seront bien plus quand on aura changé d’heure. La durée du jour diminue d’une heure quarante sept minutes, pour une durée moyenne de dix heures dans la toute dernière semaine. Il faut terminer les travaux des champs qui n’ont pas été effectués en septembre, les labours, la taille des fruitiers à pépins, l’épandage du fumier et les dernières semailles. Tout comme septembre «Octobre le vaillant surmène le paysan».

Le début du mois est marqué par la fin du mois de jeune chez les Musulmans et par la fête appelée l’Aïd el-Fitr (fête de la rupture du jeûne) encore appelé Aïd el-Séghir (la Petite Fête) par opposition à l’Aïd el-Kebir, la grande fête. Vous savez que pour déterminer le début du mois il faut observer ce moment magique où dans les premières lueurs de l’aube, apparait le très mince filet de lumière de la nouvelle lune. On dit très joliment pour déterminer ce moment : «lorsque se distingue le fil blanc de l’aube du fil noir de la nuit». Si le ciel est couvert c’est un vrai problème et il faut se référer aux autorités religieuses du pays ou de la région pour bien connaître le moment de la rupture, et rendre grâces. Nos amis Musulmans entreront alors dans le mois de Chawwaâl ou de Chawel selon les transcriptions phonétiques, de l’an 1429. Nous savons que le calendrier lunaire des Musulmans, compte tenu de la durée du cycle lunaire, est en avance de 10 à 12 jours chaque année.

Pour ce qui est de notre calendrier grégorien, c’est en 1582 du calendrier «julien» qu’il fut décidé, après les savants calculs diligentés à la demande du Pape Grégoire, que le lendemain du 4 octobre serait le 15 octobre. Ce qui valut à la grande sainte Thérèse d’Avila, décédée le 4 octobre de n’être enterrée que le 15 octobre, pourtant le lendemain de sa mort. Cette décision qui visait à faire coïncider au plus juste les calendriers avec le cycle du soleil et les saisons, a entraîné la conséquence que j’ai souvent rappelée dans ces chroniques : le décalage de leur place dans le temps de quantité de fêtes de saint et des proverbes qui leur sont liés, et leur déphasage total, comme pour ceux de la sainte Luce le 12 décembre ou de la saint Médard le 8 juin, malgré la popularité dont ils continuent de bénéficier. On relira utilement mes chroniques de décembre ou de juin sur ce sujet
Cela souligne à nouveau l’importance de se référer à la lune qui elle n’a pas changé, et de savoir, comme Monsieur Jourdain, quand il y a de la lune ou quand il n’y en a pas, pour replacer nos vieux dictons dans leur bon contexte.

Voyons un peu cela pour notre mois d’octobre 2008, en se souvenant de son influence aux différentes étapes de son cycle.
La lune atteint son apogée le 5 octobre à 11h ; elle se trouve alors à 404.721km de la terre. C’est le jour de la saint Placide, un moine disciple de saint Benoît qui l’aurait sauvé de la noyade. On en a fait le patron des noyés ! Comprenne qui pourra !
«A la saint Placide, le verger est vide» et les gelés sont à craindre «A la saint Placide, la gelée est la première de l’année». On nous annonce bien des matinées très fraîches ! C’est aussi la saint Fleur : «Quand arrive la saint Fleur, pour aller au verger, ce n’est plus l’heure»
Le premier quartier de la lune est à 9h04 le 7 octobre. Ce jour la on fête saint Serge, un officier de l’armée romaine, mort en 288. «A la saint Serge, la charrue en terre, pour niveler les taupinières». Les taupes ou les rats taupiers ont fait beaucoup de dégâts cette année. Il semble donc, vu ce proverbe, que leur présence en cette époque n’est pas si nouvelle que ça, n’en déplaise aux journaux qui parlent pour cette année d’une invasion sans précédent, en particulier en Aveyron.
La pleine lune est le 14 à 20h02, jour de la saint Calixte pape de 217 à 222 :«A la saint Calixte il n’y a plus de fleur à calice».
La lune passe par son périgée le 17 à 6h. Elle sera à 363.823 km de la terre. C’est la saint Gall, un moine irlandais, venu dans les Vosges, avec saint Colomban, (les anciens du Secours Catholique se souviendront de Monseigneur Rodhain et du Saint Mont, à Remiremont avec les ruines du monastère colombanistes dont il avait plaisir de nous entretenir). Ce jour n’est pas bon pour les vendanges. Ne dit-on pas : «Le vin de saint Gall n’est jamais un régal». Il peut se faire que le mauvais temps retarde jusqu’à ce jours les vendanges et ce n’est que mauvaise augure : «Si saint Gall coupe le raisin, mauvais signe pour le vin». Par contre il est recommandé de couper les choux d’hiver ce jour-là : «Coupe ton chou à la saint Gall, en hiver c’est un vrai régal» Vive la soupe aux choux !
Le dernier quartier de lune est le 21, à 11h55, fête de sainte Ursule : «A la sainte Ursule le froid recule»
La lumière cendrée de la lune est observable le matin jusqu’au 26, où l’on fête le premier évêque de Strasbourg mort vers 346 : «A la saint Amand, sont mûrs les glands».

La nouvelle lune est le 28 à 23h, fête des saints Simon et Jude, apôtres et martyrs : «Quand Simon et Jude n’apportent pas la pluie, elle n’arrive qu’à la sainte Cécile». Serait-ce un présage de trois semaines de beau temps avec l’été de la saint Martin ? nous verrons bien ! On dit aussi que ce jour-là il n’y a plus de mouches : «A la saint Simon, l’éventail se repose». Ce jour marque la fin de la culture des raves et aussi de toutes les cucurbitacées. Cela vient à point pour confectionner toutes sortes d’épouvantail pour Halloween : «A la saint Simon, les raves au timon»

Il faut noter encore pour notre mois d’octobre 2008 que Vénus, «la belle étoile du berger», qui nous a boudés tout l’été, se dégage peu à peu des brumes du couchant. Elle se couche le 17 octobre à 18h10 soit 1h13 mn après le soleil.

Dans un contexte qu’on nous annonce dur et difficile je dois vous rappeler que le 26 nous passerons à l’ «Heure d’hiver» qui se réfère à une autre période de crise. Cette mesure remonte au choc pétrolier de 1973. On l’a bien vite oublié.
On attribue cette décision au gouvernement de cette époque. Et pourtant le vrai père de cette idée c’est Benjamin Franklin. En avril 1784, dans le «Journal de Paris» il évoque pour la première fois la possibilité de décaler les horaires afin d’économiser de l’énergie. Arrêtons-nous quelques instants sur la façon plutôt curieuse avec laquelle il aborde la question.
Dans sa lettre aux lecteurs il commence par décrire la démonstration à laquelle il avait assisté la veille sur une nouvelle lampe à huile. Il relate la discussion qui s'en était suivie tard dans la nuit, à propos du rapport huile consommée/lumière produite. Le sujet en tête, il entre chez lui et ne s'endort que vers 3-4 heures du matin. Un bruit le réveille vers 6 heures et il s'étonne d'une grande clarté dans sa chambre. Il pense d'abord à ces fameuses lampes éclairant sa chambre mais constate, en fait, que ce sont les rayons du Soleil levant qui pénètrent dans la pièce. La lecture d'un almanach lui confirme que le Soleil se lèvera encore de plus en plus tôt jusqu'à fin juin. "Cet événement me fit penser à des choses plus importantes et plus sérieuses. Si je n'avais pas été éveillé si tôt le matin, j'aurais dormi six heures de plus à la lumière du Soleil, et, par contre, aurait passé six heures la nuit suivante à la lumière des chandelles." Et il poursuit : "En partant du principe qu'il y a 100 000 familles à Paris et que ces familles consomment la nuit 1/2 livre de bougies et chandelles par jour... En estimant de 6 à 8 heures la durée moyenne entre l'heure de lever du soleil et la nôtre... il y a donc 7 heures par nuit pendant lesquelles nous brûlons des bougies, on en arrive au décompte suivant :En six mois entre le 20 mars et le 20 septembre, il y a 183 nuits. 7 heures par nuit d'utilisation de bougie. La multiplication donne 1 281 heures. Ces 1 281 heures multipliées par 100 000 donnent 128 100 000.Chaque bougie exige 1/2 livre de suif et de cire, soit un total de 64.050.000 livres. À un prix de trente sols par livre de suif et de cire on en arrive à 96.075.000 tournois de livre." Un tournoi de livre, c'est combien d'euros ? Bref, Franklin conclut par "...une immense somme que la ville de Paris pourrait sauver chaque année !" Sa conclusion est encore plus surprenante… ou très réaliste quand on connait notre résistance, encore aujourd’hui, à tout changement : «les gens sont obstinément attachés à leurs vieilles traditions et il sera difficile de les amener à se lever avant midi". Alors il propose des sanctions :
1) Taxer d'un louis par fenêtre les habitants qui laissent leurs volets fermés.
2) Bougies rationnées à une livre par famille par semaine.
3) Policiers chargés d'arrêter la circulation après le coucher du Soleil exceptée celle des médecins, des chirurgiens et des sages-femmes.
4) Chaque matin, dès que le Soleil se lèvera, cloches d'église et, au besoin, canon informeront l'ensemble des habitants de l'arrivée de la lumière.
Notons, tout de même, que Franklin avait pour projet de réveiller les gens plus tôt et non pas de décaler les heures des montres et horloges.
L'idée, sans les loufoqueries, (encore, qu'actuellement, nos gouvernants ne sont pas à ça près !) fut reprise en 1907 par un certain William Willett (1857-1915), entrepreneur anglais.
Son idée à lui fut bien d'avancer et retarder les montres. Dans une brochure intitulée Waste of Daylight ("Gaspillage de la lumière du jour"), il explique le processus. Le décalage devait se faire durant 4 dimanches, à 2 heures du matin, en avril (avancer les montres) et en septembre (reculer les montres) à raison de 20 minutes chaque dimanche. Willet explique le choix de 2 heures du matin par le fait que c'est l'heure qui dérange le moins la circulation des trains. C’était quand même compliqué !
Son but était double : «Passer ses loisirs à la lumière du jour». Sans compter ses six premières années, un homme gagnerait une année de "jour" à 28 ans, 2 à 50 ans et 3 à 72 ans ; et surtout et encore une fois, économiser l'énergie destinée à produire l'éclairage artificiel. Passer plus de temps, pendant qu'on est éveillés, à la lumière du Soleil était le but aussi bien de Franklin que de Willet.
L’Allemagne instaure un changement d’heure en 1916. Les Anglais suivent, puis les Irlandais et l’Italie. En France le député «bas-alpin» André Honnorat dépose un projet de loi qui instaure «l’heure d’été». Nos plus anciens s’en souviennent. La guerre de 39-45 amène la suspension de la mesure; il faut attendre le 28 mars 1976 pour y revenir. On se souvient qu’à l’époque le retour à l’heure d’hiver se faisait le dernier dimanche de septembre. Aujourd’hui le changement est trop décalé par rapport aux saisons, du moins pour ce qui est de l’Automne. Si le gain reste réel, du moins officiellement puisque le ministère de l’Economie et des Finances estime pour notre pays à 250 000 tonnes d'équivalent pétrole les économies d'énergie annuelles résultant de la mise en œuvre de ce régime, la contestation de ce changement prend de plus en plus d’ampleur. Sur le décalage par rapport au rythme solaire, sur le trouble de l’horloge biologique et les problèmes psychologiques en particulier chez les enfants, là on peut encore suivre. Sur la pollution atmosphérique qui serait engendrée par des pointes de circulation déplacées vers les heures les plus chaudes de l’été, ça passe encore. Par contre, sur la répercussion sur les animaux j’ai plus de mal à suivre. Il me semble que pour eux, la nuit c’est la nuit et le jour c’est le jour et que ce n’est pas l’heure officielle qui en change la durée, le début ou la fin! Simple bon sens non ? Ils ne regardent pas l’heure à l’horloge du clocher du village pour se lever ou se coucher ! On va jusqu’à dire que le changement perturbe la traite des vaches et entraîne une baisse de la production de lait ? mais alors c’est la vache ou l’éleveur qui ne suit plus ? C’est qui perturbe qui ? De là à penser qu’on va encore demander des subventions pour compenser !

Octobre va marquer en son dernier jour le grand passage du jour à la nuit et aux ténèbres. C’est le 31, la veille du mois de Samain qui chez les Celtes, nos ancêtres, marquait le début de la moitié sombre de l’année, associé à la notion de mort. L’année était divisée en deux cycles de six mois. On comptait alors en nuits et non en jours, de sorte que les célébrations devaient commencer le 31 octobre au soir. C’est l’origine du mot «Halloween» qui serait « le soir sacré », contraction de «All Halloows’Eve» ou «All Hallows’day» en anglais. Les celtes célébraient les héros et les morts et se préparaient à affronter la longue nuit de l’hiver.
Ce dernier trimestre de notre année n’ayant pas de fête très marquante pouvant permettre l’exploitation d’un filon commercial rentable, (hormis les chrysanthèmes !) nous avons été victime, via les USA, avec un peu de sauce de la légende irlandaise de Jack O’Lantern, à coups de citrouille de «saison» et d’autres produits souvent de mauvais goût, d’une tentative d’implantation d’une fête dont on a trahi le sens profond originel et respectable. Respectable puisqu’il s’agissait avant tout du culte des morts et des ancêtres. Ne tombons pas dans le panneau. Il y a tant d’occasions de faire la fête et de s’amuser autrement, en redonnant vie à nos vieilles coutumes par exemple, voire même en reprenant des traditions de cette fête qui ont survécu et qui nous feraient sortir du ballet des sorcières ... à balai et des citrouilles ou navets creusé en lanternes, et de toutes autres fantaisies qu’on appelait autrefois des «attrape-nigauds».
Pourquoi ne pas reprendre quelques traditions culinaires qui ont survécu comme la cuisson ou l’achat d’un barmbarack ( en irlandais «barin breac») un gâteau aux fruits, léger, dans lequel on place un anneau avant la cuisson. Celui qui trouve l’anneau va trouver le véritable amour durant l’année. Il y a eu une tentative de ce genre chez des pâtissiers d’Avignon.
La citrouille peut nous permettre de retrouver les bonnes soupes de courge, si importantes pour nos santés.
On pourrait aussi regarder du côté des pommes, du cidre chaud, du blé rôti comme en Inde, et de toutes sortes de beignets… par exemple. Place à l’imagination et à la création !
Arrivé massivement en France en 1997, initialement avec un esprit artisanal, très rapidement récupéré par le commercial, Halloween a «du plomb dans l’aile» et c’est tant mieux car il y a mieux à faire que l’exploitation de l’horreur, et du laid, surtout auprès de nos enfants. En 2006 nos medias parlaient déjà de la mort d’Halloween : » Halloween in et out » titrait l’Express alors que Libération écrivait : « Halloween boit un bouillon ».
En 2007, l'insuccès d'Halloween va encore croissant. Personnellement je souhaite que cette décadence continue en 2008. "Halloween est devenue une fête complètement dépassée". L'arrivée de cette, fête païenne, proche de deux fêtes chrétiennes, la Toussaint (le 1er novembre) et le jour des Défunts (le 2 novembre) a fait réagir l'Église catholique en France. Elle a constaté qu'avec Halloween une population non chrétienne s'intéresse au sens de la mort. Pour rappeler le sens de la Toussaint catholique, le diocèse de Paris a instauré, depuis 2002, une manifestation festive baptisée Holy winsCe qui est saint est victorieux»).
En Russie, le Kremlin et l'Église orthodoxe tentent de freiner la popularité grandissante de l'Halloween. Il est maintenant interdit de la célébrer dans les écoles de Moscou.
Au Venezuela, le président Hugo Chavez ( est-ce une bonne référence !) a déjà affirmé que l'Halloween répandait la terreur et qu'il fallait que la population résiste à l'envahissement de la culture américaine
Notons encore qu’en Chine, - désormais référence incontournable ! - l'Halloween n'est pas célébrée traditionnellement, mais il existe une fête proche, la Fête des fantômes.

Voilà ce que m’inspirait ce mois d’octobre 2008 qui s’ouvre avec du beau temps ! du moins jusqu’à la prochaine étape lunaire ! et je tenterai bien de prédire du beau temps jusque vers le milieu du mois !
Bonne lecture. Addisias !

Jean Mignot le 29 septembre
en la fête de Saint Michel et des Archanges

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