Décembre
Décembre, le douzième mois de notre année " grégorienne " continue à s’appeler le dixième ( du moins étymologiquement, de decem :dix ) et de se référer ainsi au tout premier calendrier romain, celui établi sur Romulus, à l’époque où l’année ne commençait qu’en mars.
Malgré les deux grandes réformes des calendriers, celle diligentée par Jules César qui a fait le calendrier " Julien " et celle du pape Grégoire au 16ème siècle, il est curieux de constater que le nom de ce mois n’a pas changé. Pourtant il s’agissait bien dans ces réformes de faire coller au plus près la façon dont on décompte les jours de la réalité du cycle de la terre autour du soleil.Il vaut mieux qu’il ait gardé ce nom car il a bien failli s’appeler Amazone, du nom d’une dame dont l’Empereur Commode, gardait, dit-on, un souvenir affectueux. Moins heureux que César et Auguste, l’empereur ne put imposer ce nom.
Décembre voit entrer le soleil dans le solstice d’hiver, mais nous allons voir quelques effets de ces réformes des calendriers sur quelques dictons parmi les plus connus. Bien sûr décembre c’est aussi Noël et tout son cortège de traditions, plus ou moins vivaces ou plus ou moins bien respectées voire complètement transformées au point qu’elles n’auraient plus aucun sens. D’où l’importance de rappeler les plus anciennes.Quant à être le dernier mois de l’année, cela n’a pas été toujours le cas. Au 2ème siècle avant JC les années se terminaient bien en fin décembre, mais le souci des astrologues de faire coïncider au plus près la durée des jours et les saisons avec le cycle du soleil a nécessité de nombreuses réformes qui ont fait glisser le début de l’année au mois de mars puis au début d’avril, voire même à des dates différentes !
Ce n’est que depuis l’édit de Charles IX en 1564, " l’édit de Roussillon ", que le début de l’année a été fixé au 1er Janvier. L’année était alors régie par le calendrier Julien qui fixait les dates des solstices et des équinoxes. L’été était le 24 juin et l’hiver le 25 décembre ! Cette période de fin d’année a toujours été marquée, dans toutes les peuplades antiques, par la célébration de la fin de la nuit et la prédominance du jour, du soleil et de la lumière et par toutes sortes de festivités. C’est dans ce contexte là que nous trouvons Noël et la venue de La Lumière du Monde, pour les chrétiens. En adaptant la coutume populaire de la fête païenne du solstice, appelée " naissance du soleil ", en latin " natale ", à la naissance de Jésus, le pape Jules 1er en 335, décide de fêter la naissance de Jésus, à date fixe, en associant l’apparition de la lumière spirituelle à la renaissance de la lumière temporelle. Jusque là en effet on fêtait cet événement de la naissance de Jésus, de façon un peu fantaisiste et pas toujours à la même date selon les endroits. Le nom de Noël vient de là. Il est devenu natalis ; puis Nadal ou Nau en langue d’Oc (ce qui par cette altération veut dire aussi nouveau ou neuf) ; puis Noé ou Nouël en langue d’oïl.Cette décision donnait ainsi un sens nouveau au solstice, en affirmant, image concrète à l’appui, la venue au monde d’un Dieu qui sauve des ténèbres, et ouvre une ère nouvelle. En 532, le moine Denys le Petit, à l’appui d’un savant et solide calcul, démontra, sur la base des textes historiques et sacrés, que Jésus était né le 25 décembre de l’an 753 de la fondation de Rome, confirmant ainsi la date de Noël.Les religions se sont presque toujours appuyées sur l’image du jour et de la nuit, du temps et de ses effets, pour expliquer leur doctrine. Les sectes aujourd’hui reprennent bien cette même tactique ! Celles des religions qui se réfèrent au seul calendrier lunaire, sans jours ou mois de rectification ou de compensation, se retrouvent, du fait du décalage de leur calendrier avec les saisons, avec des célébrations qui ne collent plus aux réalités du temps qu’il fait ! Imaginons ce que donnerait une fête des moissons en plein mois de décembre ! Sortir une fête de son contexte c’est se priver d’une grand part d’explication didactique. Le cycle du soleil et de la lune et le calendrier ne nous lâchent pas !
Ainsi chacun peut trouver dans ces rappels une bonne occasion de fêter Noël, quelle que soient sa religion ou ses croyances, et sans nécessairement tomber dans le panneau commercial qui nous agresse de plus en plus.D’ailleurs, vouloir ignorer Noël nous ferait vite tomber dans des revendications corporatives ou syndicales ou commerciales. Par contre il me semble important de rappeler que Noël n'a pas toujours été cette fête " polluée " par les cadeaux. Les " étrennes c’était pour le " Jour de l’An ". Les plus anciens s’en souviennent. Mais aujourd’hui peut -on remettre en cause tout cela sans risquer un tollé des commerçants de tous bords ? Et pourtant ! Il faut rester la tête froide, et raisonner sainement. Je pense à une revendication de délégués du personnel dans une entreprise que je connais bien qui demandaient qu’on verse le 13ème mois dés le mois de novembre pour pouvoir profiter des promotions sur les jouets et cadeaux !Disons que Noël c’est la fête de la famille. C’est une fête qu’on a plaisir à célébrer. On se retrouve facilement autour de cela.
Seulement voilà ! Le calendrier " julien " comportait une part d’erreur qui amena un décalage tel, qu’en 1582 intervint la réforme du calendrier " grégorien ", le plus universellement reconnu aujourd’hui car le plus proche de la base astronomique du cycle solaire. Pour rattraper le retard on raya 10 jours du mois d’octobre de cette année là, et on fixa le solstice tantôt au 21 décembre ou tantôt le 22 comme pour cette année. Noël resta à la date fixée au 25 décembre ! Si Denys le Petit revenait, il se baserait sur les connaissances actuelles et proposerait de fêter Noël le 21 ou le 22 décembre !Avant cette réforme on fêtait au solstice, la venue de la lumière et c’était alors la sainte Luce et son fameux dicton :" Per santo Luço, li jour crèisson d’un pèd de clusso "" A la sainte Luce, le jour croît du saut d’une puce ! "La sainte Luce ou Lucie est passée au 13 décembre et le dicton a perdu sa justification. Il n’en reste pas moins très connu et très vivace encore aujourd’hui, et nous savons que ce n’est qu’à partir de la date du solstice que les jours vont commencer tout doucement à augmenter.La suite du dicton garde son intérêt amusant, sans que l’on puisse affirmer ses assises astronomiques.
" Et pour Nadal (Noël)
D’un pied de Gal (de coq) ;
Pour la Saint Sylvestre,
D’un pied de mestre (de maître)
Et pour les Rois
D’un pied de roi ".
Vous connaissez sans doute cette autre coutume proche de ce dicton, qui invite à regarder le temps qu’il fait entre Noël et les Rois pour prévoir le temps qu’il va faire tout au long de l’année :
" Les jours entre Noël et les Rois
Indiquent le temps des douze mois "
ou encore :
" Regarde comme sont menées
Depuis Noël douze journées,
Car suivant ces douze jours,
Les douze mois auront cours ".
Ces douze jours sont appelés " jours mâles " ou encore " Les jours de sort " ou aussi " les Ajets ". Chacun gouverne symboliquement le mois qui occupe dans l’année le même rang que lui. Nous sommes dans un système des " correspondances " cosmiques, selon lequel le petit (ou microcosme) contient le grand (ou macrocosme). C’est une des origines du fameux :" Noël au balcon, Pâques aux tisons ".
(...)
Je ne résiste pas à relire avec vous ce passage de l’Almanach des Laboureurs d’Antoine Maginus ; ce sera lus compréhensible :" Le jour de Noël représente Janvier : si le ciel est clair, l’année enrichira le vigneron." Le 26, Saint Etienne, représente février : si le ciel est clair, mauvaise année ; s’il vente pendant la nuit il y aura peu de vin." Le 27, Saint Jean, représente mars : ciel clair ou nuit venteuse, mortalité." Le 28, jour des Innocents, correspond à avril : ciel clair, maladies ; nuit venteuse, famine." Le 29, saint Thomas, représente mai ; ciel clair, abondance ; nuit venteuse, infirmités." Le lendemain, la saint Roger représente juin : ciel clair, abondance de fruits et légumes ; nuit venteuse, abondance de grain." Le 31, saint Sylvestre, représente juillet : ciel clair, poissons, abondance de grain et vin rares ; nuit venteuse, disette." Le jour de l’an représente août : ciel clair, gibier ; nuit venteuse, mortalité." Le 2, l’octave de Saint Etienne, représente septembre : ciel clair, les animaux donnent profit ; nuit venteuse, peste sur le bétail et les abeilles." Le 3, l’octave de Saint Jean, représente octobre : ciel clair, octobre lourd et orageux." Le 4, l’octave des saints Innocents, correspond à novembre : ciel clair, épidémies ; nuit venteuse, mortalité." Le 5, veille des Roys, représente décembre : ciel clair, guerre ; nuit venteuse, corbeaux et loups auront pâture à souhaits "
On invoque aussi, en ce mois de décembre, la sainte patronne des artilleurs, des mineurs, des pompiers et par extension de tous les gens d’armes, parce la légende nous dit, que Barbe, aurait été emprisonnée par son propre père puis décapitée pour s’être convertie à la foi chrétienne. Ce père qui l’avait ainsi martyrisé fut dit-on tué aussitôt par la foudre. Ce serait l’origine de la fête de sainte Barbe le 4 décembre.
Je dois dire ici mon grand étonnement de voir fleurir ici et là, en ce moment, les fêtes de la Sainte Geneviève organisée par les brigades, unités et autres compagnies de gendarmes, alors que la fête de la sainte patronne de Paris et de la gendarmerie reste bien fixée au 3 janvier. Les Parisiens et la Garde Républicaine, entre autres ne se trompent pas. Quand on cherche la raison de ce qui pourrait paraître une erreur, ou une recherche d’opportunité avec un rapprochement de la sainte Barbe et des périodes de fêtes qui foisonnent en ces temps de fin d’année, on trouve une explication.
Les chroniques citent, pour la première fois, la présence des sergents-d’armes lors de la 3e croisade, au siège de Saint Jean d'Acre, en 1191. Ils sont alors placés sous l'autorité du sénéchal et constituent les gardes du corps du roi. Ils sont déjà pourvus de quelques attributions judiciaires. Il est rapporté que leur vigilance permet de déjouer un attentat que Saladin 1er , le sultan d'Egypte et de Syrie, préparait contre les personnes de Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. Au retour de la croisade, Philippe Auguste conserve cette petite troupe dévouée et lui confie en permanence sa sécurité. 24 ans plus tard, c'est-à-dire en 1214, nous retrouvons nos sergents-d'armes à la Bataille de Bouvines où leur comportement exemplaire est déterminant pour l'issue de la bataille. Après la victoire de Bouvines, les sergents-d'armes, aux ordres du sieur d'Estaing, se placent sous la protection de Sainte Catherine (je dis bien Catherine, et non Geneviève}. Après la disparition du dernier sénéchal, les sergents-d'armes, déjà appelés prévôts, se trouvent placés sous l'autorité du connétable. Ce sont les ancêtres de notre gendarmerie.
Sainte Catherine leur première patronne ayant été vouée à d’autres occupations, il fallait retrouver un patronage symbolique et fort et ne pas galvauder la gendarmerie en lui faisant voisiner de trop près les "Catherinettes". A la requête de l’évêque aux Armées et du père Wagner, Aumônier National, le pape Jean XXIII, en 1962, proposa le patronage de Sainte Geneviève aux familles catholiques de la gendarmerie française. Pour des raisons de commodités et pour tenter de trouver une légitimité " historique " à ce patronage, on fit le rapprochement avec le " Miracle des Ardents " et on trouva ainsi une raison de justifier que les membres des gendarmeries et leurs foyers soient invités à organiser une fête entre le 26 novembre et le 3 janvier, voire quelques jours après !
Il faut rappeler ce qu’est le " Miracle des Ardents " et ne pas le confondre avec le " Bal des Ardents ".On commémore le 26 novembre la grande épidémie qui, en 1130, ravagea Paris. L’évêque du lieu finit par demander qu’on descende à Notre Dame les reliques de Sainte Geneviève. Les chroniqueurs de l’époque nous disent qu’une centaine de malades furent guéris après avoir effleuré la chasse du bout des doigts. Le mal des ardents était cette maladie qui brûlait les entrailles à la suite de consommation d’ergot de seigle altéré par des intempéries.
On parlait aussi du " feu de Saint Antoine " On trouve fréquemment ce mal et ses ravages dès 994 en Aquitaine avec des interventions et invocations à Saint Martial, à Limoges, mais aussi des affaires semblables dans le nord, en particulier à Arras ainsi qu’un peu partout en France.Alors entre le feu de la sainte Barbe, le Mal des Ardents, le Feu de saint Antoine, la sainte Catherine, et la sainte Geneviève, on trouve un peu ce qu’on veut dans tout ça et on pense surtout à faire la fête !
(...)
Le 6 décembre c’est la saint Nicolas. Il faut bien aussi parler de celui-là. Il est si célèbre et si lié aux fêtes de Noël. Cet évêque de Myre en Lydie c'est-à-dire en Asie Mineure, mort en 350, est entré dans la légende par le miracle des trois enfants qu’il aurait ressuscités. Un jour, il se serait arrêté dans une auberge où le patron aurait écorché trois enfants, -on dit parfois trois écoliers-, et les avait mis au saloir pour les servir à ses clients. L’évêque, informé, les en retira vivants et convertit leur assassin. A la place de l’aubergiste, on parle parfois d’un boucher. En réalité, il semble que cette légende tardive vienne d’un épisode au cours duquel Nicolas aurait délivré trois militaires, injustement condamnés et enfermés dans une tour. Représentés par un statuaire en petit format et sortant d’une tour aux côtés du saint, lui en grand format, ils auraient été pris pour des enfants et on aurait inventé le reste. Voilà en tous cas, l’origine du patron des enfants sages, des écoliers, des enfants de chœur et, bien sûr l’origine également de ses activités de Père Noël. Très populaire en Russie, patron de la Lorraine, saint Nicolas, santa Klaus, est aussi invoqué par les navigateurs, et également par les jeunes filles à marier, depuis qu’il empêcha un père démuni de livrer les siennes à la prostitution, en leur offrant des bourses pleines d’or. Pourtant, même en dehors de la Lorraine et du Nord de la France, son prénom a toujours été très porté. Passé de mode au XIXe et au XXe siècles, il revint dans les années 60, grâce à un héros de programmes télévisés enfantins, compagnon du marchand de sable, qui le mit pour un temps au zénith des prénoms masculins.
Si novembre a été doux et venteux au point de nous surprendre et d’entendre une fois de plus des propos du genre " jamais vu ! " voici pour rafraîchir notre mémoire : 7 novembre 1944, les températures dépassent partout les 20°. On atteint même 23 ° à Bourges ! et le 20 novembre 1994, c’est récent, il a fait chaud sur une grande moitié du pays. On a enregistré 25° sur le Limousin.. Ou encore 23° à Aurillac le 6 novembre 1992, ; 22° à Orléans le 6 novembre 1955 ; 26° à Biarritz le 8 novembre 1985 ; 24° à Marseille le 11 novembre 1984 ; 23°à Nevers le 7 novembre 1994 et je pourrai continuer la série… Alors ? Vous avez dit exceptionnel ? Sans compter que j’aurai pu citer ici, pour le même mois, des records de froid… !Laissons le temps au temps ! l’hiver va être très vite là.
La sagesse populaire nous l’annonce : :
"A la saint Nicolas, l’hiver est là !"
Un premier changement de temps s’est amorcé un peu partout avec le début du mois lunaire et un nœud lunaire ce mercredi 29. La lune sera à son périgée le 2, et pleine lune le 5. Le temps pourrait bien changer tout d’un coup. Attention aux gelées matinales, et au verglas sur les routes. Si ce n’est déjà fait, pensons à protéger les plantes gélives que nous aurions laissées en plein air. C’est le moment ou jamais de le faire.
Bon Noël et Bonnes fêtes à chacun de vous, en famille et avec vos amis !
Jean Mignot
http://cruviers-larnac.blogspot.com/
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