mercredi 13 avril 2005

Les raisons de la défaite prussienne en 1870...dans le Nord

Elle n’attire même plus le regard du passant. Pourtant, cette statue de bronze du parisien Léopold Morice fut longtemps le monument aux morts dunkerquois, en hommage aux soldats de 1870. Erigée en 1906, la France soutient un marin blessé alors qu’un fantassin gît à ses pieds. Cette guerre qui fit chuter le régime de Napoléon III et entraîna la naissance de la IIIe République fit de l’Allemagne le nouvel ennemi héréditaire. L’œuvre de Morice rappelle chaque jour la perte de l’Alsace et de la Moselle, devenues le 26e état du IIe Reich en 1911, incitant à la revanche jusque 1914 mais elle ne dit pas que le Nord eut alors une destinée exceptionnelle grâce à un général devenu ici aussi populaire que Vauban : Faidherbe. Grâce à lui, le Nord fut un des trop rares départements à ne pas subir l’occupation prussienne : l’ancien gouverneur du Sénégal détourna trois mois durant l’ennemi de Paris en engageant des forces considérables dans une petite région entre Amiens, La Fère, Saint-Quentin et Bapaume, empêchant d’aller vers Paris mais aussi vers la côte. Peu de gens savent pourquoi la quasi totalité des villes du Nord ont une rue, une place ou une école Faidherbe…

L’Armée du Nord

Le 22 octobre 1870, le Général Bourbaki a le commandement du Nord. Il regroupe immédiatement autour de Lille ses forces dispersées dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Somme, rejointes par de nombreux évadés de Sedan et de Metz, mais les Allemands progressent vers Amiens. Son second, le Général Farre, le remplace et attaque mais il ne dispose que de 25.500 hommes et 60 pièces d’artillerie sur un terrain difficile face à 39.300 soldats aguerris et 174 canons. Les combats sont âpres. La défaite de Villers-Bretonneux le 27 novembre 1870 ouvre la porte d’Amiens et la route de Rouen à l’ennemi. Le 3 décembre, Faidherbe lui succède mais il garde Farre comme Chef d’Etat-Major. Avec des troupes fraîches mais peu préparées, il obtient la capitulation du château d’Ham en intimidant l’occupant, fait unique dans toute la guerre côté français. Les 12 et 13, il est devant la Fère. Le 14, il marche sur Amiens.

La Bataille de Pont-Noyelles ou de l’Hallue (23 décembre)
La veille de Nöel, Faidherbe concentre ses troupes au nord-est d’Amiens. Sa résistance est opiniâtre. Repoussant les attaques allemandes, il laisse un temps ses hommes en position malgré le froid intense pour fixer les Allemands sur place mais, finalement, il se replie entre Arras et Douai, sur la Scarpe pour économiser leurs forces.
L’ennemi décide d’assiéger Péronne le 27 décembre 1870, primordiale pour contrôler toute la Somme. Un siège en règle commence, prélude à la bataille de Bapaume du 3 janvier 1871. Malgré son infériorité numérique, Faidherbe prend l’offensive. Ses troupes repoussent l’ennemi. Bapaume est à portée de tir mais Faidherbe n’attaque pas la ville, espérant que l’occupant l’évacue. Et çà marche ! Ce dernier se décide de se replier dans la nuit... Bapaume redevient française, Faidherbe croit bon de revenir sur ses pas pour cantonner à Baisieux-au-Mont pour en contrôler le chemin de Fer. Laissée sans protection, Bapaume est reprise par les Allemands qui s’y attribuent finalement la victoire.

Finalement le 9 janvier, bombardée, Péronne capitule car Français tardent. Faidherbe est forcé à marcher sur Saint-Quentin. Prise, cette ville obligerait l’ennemi à détourner ses efforts du siège de Paris, dont les défenseurs pourraient alors consentir un ultime effort. Le succès est conditionné par la rapidité et le secret... que le verglas compromet : la marche est lente et l’ennemi s’aperçoit de la manœuvre.
Les combats du 18 janvier 1871
Le jour de la proclamation du IIe Reich dans la Galerie des Glaces de Versailles, les combats font rage au Nord. Les deux armées se battent à Vermand (Tertry pour les Allemands) que les Allemands ne peuvent enlever. Le front s’étire sur 27 kilomètres. Le 19, la bataille continue autour de Saint-Quentin avec des forces françaises toujours inférieures et il faut battre en retraite pour barrer la route de Cambrai. L’armée du Nord se retire sans encombres et se reconstitue poursuivie par les Allemands.

A Bordeaux, l’Assemblée nationale se réunit pour la première fois le 12 février et nomme Thiers chef de l’exécutif le 17. Il signe les Préliminaires de Paix à Versailles le 26 : en plus des dommages exorbitants à lui payer, l’Allemagne occupe une grande partie des départements français, à l’exception du Nord que ces batailles à front renversé avaient pu préserver grâce à l’action de Faidherbe. Ni Lille, ni Dunkerque ne tombèrent et Faidherbe, ce natif de Lille, devint un héros.


Pour en savoir plus :
http://www.cheminsdememoire.gouv.fr

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