sans la peste mais avec le choléra
Mesurons nous notre chance avec le virus H1N1, de vivre dans un monde où l’on peut facilement accéder aux soins et avoir des traitements relativement efficaces ?
La grippe A, pour inquiétante qu’elle puisse être, fait pâle figure face aux épidémies qui la précédèrent. Passons sur la peste noire qui fit des ravages dans la population flamande au Moyen-âge, ou plus près de nous la « grippe espagnole » qui tua, dans le monde, plus de personnes que la Grande Guerre elle-même. C’est qu’au delà des morts, les épidémies révèlent beaucoup sur les sociétés qu’elles frappent. Un exemple parmi d’autres, le choléra en 1866…
Un ennemi inconnu : le vibrion cholérique
Le bacille du choléra n’a été identifié qu’en 1884, autant dire que les épidémies qui régulièrement touchent la région laissent longtemps le corps médical sans réponse. Le Nord est déjà une terre de prédilection pour la diphtérie, la typhoïde et d’autres maladies terriblement contagieuses. La première épidémie de choléra survient en France en 1832, amenée par les navigateurs et autres voyageurs. En novembre 1848, la maladie prend naissance dans le port de Dunkerque. La faute à ces navires plus rapides dont les passagers ne meurent plus en mer mais débarquent désormais malades ou contaminés. En 1866, le premier cas est signalé à Saint-Pol-sur-Mer le 6 février, le dernier à Cambrai le 22 novembre. Les médecins sont sans réponse face à cette maladie. Nul ne sait qu’elle se transmet voie digestive, au contact des eaux souillées par les selles des malades, atteints de vomissements et de diarrhées aqueuses et inodores, qui se déshydratent rapidement puis meurent… Rien ne permet alors de la soigner, hormis la chance. Même de nombreux médecins tombent avec leurs malades.
Ce qui est nouveau, c’est la forte mortalité: la moitié des malades contaminés décède, la contagion est fulgurante et la presque totalité du département est touchée. Si l’on ne connaît pas la nature de l’agent infectieux, force est de constater, avec impuissance, que la maladie trouve un terrain favorable dans des foyers déjà rudement touchés par les autres maladies. Les malades sont déjà fragilisés, ne peuvent souvent pas appeler le médecin trop cher pour eux, et sont souvent réfractaires aux nouveautés médicales.
Le foyer ouvrier, lieu de tous les dangers
Premier en cause, les taudis où la pauvreté dispute à la promiscuité. Les villes du Nord ont leurs ilots de pauvreté extrême. A Dunkerque, les maisons sont sans eau courante (l’adduction d’eau ne date que de 1906) où il faut puiser dans des citernes d’eau pluviale, et où les latrines, des fosses qu’il faut vidanger n’en sont jamais très loin. Pire encore, dans les courées et dans les cités construites par les patrons, les toilettes sont collectives. Le constat est limpide : « En examinant aussi les conditions sociales des personnes atteintes par l’épidémie, on constate que c’est la classe ouvrière qui a été presqu’exclusivement frappée pour ainsi dire partout. La raison de ce fait paraît facile à déduire; n’est-ce pas en effet la classe ouvrière qui par ses labeurs, sa nourriture peu substantielle, l'exiguïté de ses logements et, il faut le dire, ses habitudes d’intempérance, se trouve dans la situation hygiénique la plus défavorable? A Valenciennes, cependant, toutes les classes de la société ont dû payer leur tribut au fléau.» (Annuaire Statistique du département du Nord, 1867, page 380). A Dunkerque et dans les quartiers ouvriers, l’habitant populaire se résume à de petites maisons de deux ou trois pièces où toute la famille s’entasse. Ce n’est pas pour rien que les hommes se réfugient dans les estaminets, plus pour échapper à la famille que pour la convivialité des lieux.
Les douves de l’enceinte fortifiée, les canaux sont autant de cloaques à ciel ouvert… Dans les rues, hommes et femmes pissent le nez dans les étoiles, les déjections stagnent entre les pavés, pour s’écouler dans les canaux aux eaux lentes. Quant aux ordures, elles sont déposées à même le trottoir pour être ramassées dans des tombereaux, il faut aussi chasser le gaspard, le rat qui cohabite avec les hommes… L’éradication de ces maladies doit autant aux découvertes des vaccins et des médicaments qu’à la transformation des villes en celles dans lesquelles nous vivons maintenant et surtout la mise en place de la Sécurité Sociale offrant un accès égal aux soins pour tous… Comment alors s’impatienter pendant la diffusion des spots sur la grippe A ?
La grippe A, pour inquiétante qu’elle puisse être, fait pâle figure face aux épidémies qui la précédèrent. Passons sur la peste noire qui fit des ravages dans la population flamande au Moyen-âge, ou plus près de nous la « grippe espagnole » qui tua, dans le monde, plus de personnes que la Grande Guerre elle-même. C’est qu’au delà des morts, les épidémies révèlent beaucoup sur les sociétés qu’elles frappent. Un exemple parmi d’autres, le choléra en 1866…
Un ennemi inconnu : le vibrion cholérique
Le bacille du choléra n’a été identifié qu’en 1884, autant dire que les épidémies qui régulièrement touchent la région laissent longtemps le corps médical sans réponse. Le Nord est déjà une terre de prédilection pour la diphtérie, la typhoïde et d’autres maladies terriblement contagieuses. La première épidémie de choléra survient en France en 1832, amenée par les navigateurs et autres voyageurs. En novembre 1848, la maladie prend naissance dans le port de Dunkerque. La faute à ces navires plus rapides dont les passagers ne meurent plus en mer mais débarquent désormais malades ou contaminés. En 1866, le premier cas est signalé à Saint-Pol-sur-Mer le 6 février, le dernier à Cambrai le 22 novembre. Les médecins sont sans réponse face à cette maladie. Nul ne sait qu’elle se transmet voie digestive, au contact des eaux souillées par les selles des malades, atteints de vomissements et de diarrhées aqueuses et inodores, qui se déshydratent rapidement puis meurent… Rien ne permet alors de la soigner, hormis la chance. Même de nombreux médecins tombent avec leurs malades.
Ce qui est nouveau, c’est la forte mortalité: la moitié des malades contaminés décède, la contagion est fulgurante et la presque totalité du département est touchée. Si l’on ne connaît pas la nature de l’agent infectieux, force est de constater, avec impuissance, que la maladie trouve un terrain favorable dans des foyers déjà rudement touchés par les autres maladies. Les malades sont déjà fragilisés, ne peuvent souvent pas appeler le médecin trop cher pour eux, et sont souvent réfractaires aux nouveautés médicales.
Le foyer ouvrier, lieu de tous les dangers
Premier en cause, les taudis où la pauvreté dispute à la promiscuité. Les villes du Nord ont leurs ilots de pauvreté extrême. A Dunkerque, les maisons sont sans eau courante (l’adduction d’eau ne date que de 1906) où il faut puiser dans des citernes d’eau pluviale, et où les latrines, des fosses qu’il faut vidanger n’en sont jamais très loin. Pire encore, dans les courées et dans les cités construites par les patrons, les toilettes sont collectives. Le constat est limpide : « En examinant aussi les conditions sociales des personnes atteintes par l’épidémie, on constate que c’est la classe ouvrière qui a été presqu’exclusivement frappée pour ainsi dire partout. La raison de ce fait paraît facile à déduire; n’est-ce pas en effet la classe ouvrière qui par ses labeurs, sa nourriture peu substantielle, l'exiguïté de ses logements et, il faut le dire, ses habitudes d’intempérance, se trouve dans la situation hygiénique la plus défavorable? A Valenciennes, cependant, toutes les classes de la société ont dû payer leur tribut au fléau.» (Annuaire Statistique du département du Nord, 1867, page 380). A Dunkerque et dans les quartiers ouvriers, l’habitant populaire se résume à de petites maisons de deux ou trois pièces où toute la famille s’entasse. Ce n’est pas pour rien que les hommes se réfugient dans les estaminets, plus pour échapper à la famille que pour la convivialité des lieux.
Les douves de l’enceinte fortifiée, les canaux sont autant de cloaques à ciel ouvert… Dans les rues, hommes et femmes pissent le nez dans les étoiles, les déjections stagnent entre les pavés, pour s’écouler dans les canaux aux eaux lentes. Quant aux ordures, elles sont déposées à même le trottoir pour être ramassées dans des tombereaux, il faut aussi chasser le gaspard, le rat qui cohabite avec les hommes… L’éradication de ces maladies doit autant aux découvertes des vaccins et des médicaments qu’à la transformation des villes en celles dans lesquelles nous vivons maintenant et surtout la mise en place de la Sécurité Sociale offrant un accès égal aux soins pour tous… Comment alors s’impatienter pendant la diffusion des spots sur la grippe A ?
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