vendredi 1 juin 2007

du mois de juin 2007...

Le nom du quatrième mois de l’année dans le calendrier institué par Romulus, fondateur de Rome, notre sixième mois de notre année «grégorienne», juin, a une étymologie discutée. Pour les uns il est consacré à Junon et à la jeunesse romaine et pour d’autres à un des fondateurs de la république, le premier consul Junius Brutus, fils adoptif de Jules César.

On dit aussi que «juin» viendrait de juniores, «jeunes gens», tout comme «mai» viendrait de majores, «hommes âgés». La chose la plus probable, compte tenu que le nom de ce mois vient du premier calendrier romain, est que «Juin» vient bien de Junon, selon une habitude courante chez les habitants du Latium à cette époque, de dédier à un dieu chacun des mois de l’année avant qu’on ne fixe des noms liés au système numérique.
C’est le mois des mariages et des mères à cause de la référence à Héra et la maturité qu’elle symbolise. Des quantités de croyances et légendes populaires en découlent dont par exemple la tradition en vigueur dans les temples de Junon qui voulait que les femmes se coiffent en séparant leur chevelure en deux, théoriquement avec la pointe d’une lance, pour symboliser la fusion des principes lunaire et solaire. C’est sans doute l’origine de cette coiffure des jeunes filles que l’on appelle les couettes !

Pour nous c’est le mois du tournoi de Roland Garros, de la saint Médard, du solstice et de la fête de la Musique, de la saint Jean d’été, et le mois qui nous annonce la chaleur et les vacances.

Juin est un mois ou le temps a des sautes d’humeur comme celles de la fameuse Junon. C’est un mois qui souffle le chaud et le froid. Qui n’a pas observé le temps qu’il fait de façon quasi systématique pendant le tournoi de Roland Garros? Or cette période est bien connue des scientifiques qui appellent cette période la «mousson d’Europe». On trouve au moins vingt proverbes pour maudire la pluie de juin et ses méfaits notamment sur l’avoine que l’on récolte ce mois-ci. Dans notre France rurale traditionnelle, et jusqu’à une époque récente (1950-1960) le cheval a été l’auxiliaire indispensable de l’homme, du voyageur et du guerrier, du commerçant et du paysan. Or le cheval est un gros mangeur d’avoine !

Ces perturbations de juin sont la résultante de l’influence de la lune dans sa course autour de la terre. Tour à tour en ce mois de juin 2007 elle sera «pleine lune» le 1er juin mais aussi le 30 ! ce qui ne veut pas dire deux lunaisons dans le mois, car la nouvelle lune, donc le nouveau mois lunaire, commencera le 15. Nous connaissons bien ce décalage du mois lunaire et des calendriers qui s’y réfèrent, avec une révolution appelée «sidérale» qui dure 27 jours, 7 heures, 43 minutes et 11 secondes. C’est ce temps qui nous intéresse pour le jardinage. Il nous donne la durée de l’orbite de lune autour de la terre. Quand cette orbite coupe le plan de l’écliptique, c’est à dire le plan sur lequel le soleil semble se déplacer autour de la terre, il y a «nœud lunaire». Cette révolution sidérale est donc tantôt ascendante et tantôt descendante. On dit alors «lune montante» ce sera du 2 au 15 juin, et «lune descendante» du 15 au 29. En lune descendante on plante, on bouture, on repique, on taille. En lune montante, on sème, on greffe, on récolte. Aux changements entre le mouvement montant et descendant, se situent les nœuds lunaires. Ce sont des jours où il faut laisser la terre se reposer. Ce sont aussi toujours des moments où on enregistre des perturbations du temps. D’où l’importance leur importance, le 8 juin et le 20 juin. C’est alors qu’il faut vérifier la véracité de nos vieux dictons et proverbes. L’influence de la lune est d’autant plus forte ou faible qu’elle est proche ou éloignée de la terre : le 12 juin à près de 360.000 kilomètres de nous à son «périgée» et à son «apogée» le 24 juin à plus de 405000 kilomètres de la terre. Je dois encore préciser qu’il ne faut pas confondre tout ceci avec la «lune croissante» ou la «lune décroissante». Nous savons tous que la lune ment ! Quand elle se montre sous la forme d’un mince croissant en forme de «C», elle est décroissante et quand le «C» est renversé, elle est croissante. Ici, il s’agit de l’éclairage de la face de la lune par le soleil, et le temps que met ainsi la lune détermine la durée du mois lunaire est de 29 jours, 12 heures, 44 minutes et 2 secondes… ce qui augmente d’autant plus les difficultés non seulement de calcul et de concordance des calendriers mais aussi la difficulté de se fier aux proverbes si on ne fait pas un rapprochement précis avec l’ensemble de ces éléments.

Pour être complet, le 21 juin, le soleil est au plus haut de sa course. Il va redescendre tous les jours un peu plus bas sur l’horizon. La journée sera la plus longue de l’année avec 16 h et 7 minutes.
La montée de la sève des arbres et plantes va progressivement diminuer. C’est la fin du temps des semis. Commence le temps des récoltes.

Quel proverbe citer ici qui n’ait son contraire ? «En juin la pluie est loin, et s’il pleut, chaque goutte est comme le poing».. La pluie de juin est néfaste si elle est persistante et s’accompagne d’un déficit de chaleur. Elle occasionne alors la dégénérescence des fruits, le pourrissement des fleurs non fécondées : sous l’action des pluies abondantes, le pollen est entraîné et «coule» avant qu’il ait pu féconder.. il n’y aura pas de raisin, pas de blé, donc pas de pain. Mais si la pluie est accompagnée de chaleur, le sort de la récolte est tout autre.

Qui ne connaît le fameux Saint Médard ? C’est le saint du calendrier le plus célébré par la verve «dictonne» : «S’il pleut à la saint Médard, il pleuvra quarante jours plus tard !». Ce dicton daterait du XI ème siècle. A cette époque, on vivait encore sous le calendrier julien. La saint Médard était alors située le 20 juin, veille du solstice d’été, l’un des jours où la lumière solaire est la plus vivifiante, en une époque où les influences astronomiques peuvent amener des troubles atmosphériques se traduisant par des orages et de la pluie ? S’il fait beau ou pluvieux ce jour-là, les conditions de la saison s’en ressentiront sûrement. Cette forte croyance populaire avait donc sous le calendrier julien des bases météorologiques solides. Avec les modifications du pape Grégoire XIII en 1582, la saint Médard gagna douze places (8 juin) et sa pluie a perdu l’importance que les adages populaires continuent de lui prêter. On adopta alors saint Barnabé pour donner un sens restrictif aux dictons de la saint Médard. Mais les automatismes ont la vie dure !
Quan ploou pers an Médar
De la recolto empouerto un quar
Quan ploou pa
N’empouerto la mita
.
("Quand il pleut pour la saint Médard, de la récolte il manque un quart, quand il ne pleut pas, il en manque la moitié").
Nous noterons que cette année la saint Médard tombe un jour de nœud lunaire, le 8 juin ! Peut-on prévoir des perturbations du temps et de la pluie? Nous venons de voir que la lune sera éloignée de la terre et que sa course sera ralentie de ce fait. Donc ?...…
Pour ce qui est du personnage du saint et de sa fête en ce 8 juin, il n’y a qu’une lointaine relation de cause à effet. En effet saint Médard était un jeune picard, né à Salency, en 457, puis devenu évêque de Noyon. Il est connu pour être resté tout un jour sous une pluie battante – sans doute une de ces violentes pluies d’orages fréquentes en ces périodes - sans être mouillé. De là à en faire un «marchand de parapluies» !
Il faut aussi parler de son compère Barnabé : «Quand il pleut à la saint Médard, si Barnabé ne lui ferme pas son bec, il pleut quarante jours après !» C’est ce qui justifie le dicton suivant : «Le jour de la saint Barnabé ( le 11 juin), est le plus beau jour de l’année.» C’est lui en effet qui vient : «Couper l’herbe sous les pieds» de son compère, baptisé de «grand pissard» et «reboutonner sa culotte». Pour faire le pendant à son compère Médard, on dit que Barnabé était «marchand d’ombrelles» !

Au sège de Namur, en 1692, la saint Médard n’a pas failli à sa renommée. «Le beau temps se tourna en pluies, de l’abondance et de la continuité desquelles personne de l’armée n’avait vu d’exemple, et qui donnèrent une grande réputation à saint Médard. Il plût ce jour-là à verse, et on prétend que le temps qu’il fait ce jour-là dure quarante jours de suite. Le hasard fit que cela arriva cette année. Les soldats, au désespoir de ce déluge, firent des imprécations contre ce saint en recherchant, des images et les rompirent et brûlèrent tant qu’ils en trouvèrent.» écrit Saint-Simon dans ces Mémoires.

Avec le solstice d’été le 21, nous retrouvons la fête de la musique. Certes un ministre, à la belle chemise rose, a permis de renouer avec les festivités qui ont de tout temps marqué la période où le soleil brille de tous ses feux. Mais je dois rappeler qu’avant la réforme de notre calendrier «grégorien» le solstice était le 24 juin, tout comme le solstice d’hiver le 24 décembre et que c’est dans les festivités qui accompagnent ces deux dates qu’il faut trouver la véritable origine de la fête de la musique. Cette origine est renforcée par un fait historique.
C’est un moine, Guy, de la petite ville d’Arezzo en Toscane, proche de Sienne, qui au XI ème siècle, en recherchant à la fois un système de notation musicale et un système de codification des intervalles musicaux, a imaginé ce qu’on désigne aujourd’hui par le mot de «gamme». Alors que les notes étaient choisies dans les premières lettres de l’alphabet, c’est lui qui inventa le procédé mnémotechnique par lequel on nomme les notes de la gamme dans les pays latins, à partir des syllabes initiales de chaque vers de l’hymne des Vêpres de la fête de saint Jean Baptiste :
Ut queant laxis
Resonare fibris
Mira gestorum
Famuli tuorum
Solve polluti
Labii reatum
Sancte Ioannes
.

Ce qui signifie approximativement : "Pour que puisse résonner sur les cordes détendues de nos lèvres, les merveilles de tes actions, enlève le péché de ton impur serviteur, O saint Jean." et n’a pas grand chose à voir avec la musique elle-même !
Ce détail historique est bien connu des bons amateurs de musique, même si quelques chercheurs tentent une nouvelle approche, comme récemment en 1988 MM Chailley et Viret dans La Revue Musicale, qui voudraient interpréter autrement cette origine du nom des notes. Ce serait dommage d’effacer cette jolie histoire !
La musique est bien au cœur du solstice et de la fête du grand saint Jean. Cette belle fête d’été se situe au moment où le soleil brille le plus longtemps. Elle a remplacé les fêtes païennes du solstice d’été et les feux de joie que l’on allumait un peu partout dans les campagnes au soir du 23 juin, tradition qui s’est perpétuée à travers les siècles et encore aujourd’hui dans nos campagnes et même à Paris au pied de la Butte de Montmartre. Seuls la sécheresse et les risques d’incendie viennent perturber ces vieilles coutumes.
"A la Saint Jean, les feux sont grands."Pour ces feux, on collectait autrefois, fagots et bûches, de maison en maison : tout refus attirerait des calamités sur la famille ! A la nuit noire, le bûcher était allumé par le prêtre, ou parfois les derniers mariés, ou encore des enfants prénommés Jean ou Jeanne. Rondes et concours de sauts allaient bon train. On récitait des prières.
La fumée du feu de la saint Jean est sensée protéger enfants et animaux des maladies et paraît propice à la fécondité. C’est le moment, pour les jeunes couples, de faire connaître leur intention de mariage en traversant le foyer main dans la main (Pour autant, ce n’est pas la bonne époque pour la noce : gros travaux obligent !). On attribue aux feux de la saint Jean des pouvoirs «fécondants». On brûle plantes parasites et animaux répugnants comme les serpents, les rats, les crapauds. La braise, recueillie dans un sabot, est répandue dans un champ ou un jardin pour éloigner les nuisibles. Les cendres ont des vertus purificatrices pour les couples et les animaux ; Un tison placé sur le rebord de la fenêtre protège de la foudre ou de l'incendie.
Au matin de la Saint Jean, il est bon de puiser de l’eau à trois endroits différents pour se préserver des maladies de peau. La nuit du 23 au 24, à la clarté de la lune, «al rai de la luno», ou le matin, avant l’aube, il faut cueillir les fameuses «herbes de la saint Jean», «lis erbo de sant Jan» dont on dénombre une bonne trentaine.
C'est en effet, lors du solstice d'été que les plantes contiennent le plus d'énergie solaire. Nous avons vu que c’est le moment où la sève des plantes achève sa montée. Aussi, c'est en cette période que se cueillent les plantes qui combattent le feu, c'est-à-dire les brûlures.
La plante la plus réputée est le millepertuis qui protège du tonnerre, chasse le diable. On l’appelle chez nous «l'erbo de l’oli rouge» car on fait infuser les sommités dans le l’huile. Auparavant on fait passer les graines cueillies, par trois fois dans la flamme du feu en criant : «Sant Jan la grano !». On l’appelle aussi la «casso-diable». Vient ensuite l'armoise ou «ceinture de saint Jean». Plutarque disait que l ‘écume ramassée sur l’infusion de cette plante, préservait les bergers de la morsure des serpents, et Apulée, que porter de l’armoise sur soi empêche de sentir la fatigue du voyage. C’est l’herbe de la route bien connue des pèlerins. «Se sabiés li vertu de l’artemiso, n’en garniries l’orlet de ta camiso» «si tu savais les vertus de l’artémise, tu en garnirais l’ourlet de ta chemise.» Elle passe pour avoir des vertus pour guérir le mal des yeux. On dénombre aussi l'orpin «poivre de muraille» ; la verveine qui aurait le pouvoir de prémunir contre les cauchemars ; l'immortelle «herbe de saint Pierre» ; la fougère mâle qui fleurit à minuit sonnant, et produit ses graines et les sème dans l'heure qui suit ; l'épervière, plante du soleil, employée par les druides pour chasser les démons, la sauge, la camomille, ou encore le salsifis sauvage pour préparer des remèdes capables de guérir bêtes et gens. Les pétales de lys seront présentés à la flamme puis mis à macérer dans l’eau de vie et serviront à soigner les plaies, notamment les brûlures, en prononçant cette formule : "Saint Jean le Désiré, où es-tu donc resté? Derrière un pied de blé fleuri et grainé ?"
On trouve aussi dans la liste les feuilles de noyer et le lierre terrestre
Ces plantes sont montées en bouquets, en croix ou en couronnes et mises au fronton des portes afin de porter bonheur, c'est : «le bouquet de la bonne aventure»

Nous n’oublierons pas, dans la nuit de la saint Jean, de cueillir les noix, ou les feuilles du noyer, pour faire le vin de noix à offrir aux amis.

C’est à cette date que les domestiques saisonniers sont loués pour les grands travaux de l’été : un nouveau cycle commence.

Bon mois de juin ! Addisias.

Jean Mignot
26 mai 2007

Et pour mémoire : 25 mai 1967 : ouragan au nord de la Loire ; 27 mai 1967 : de très violents orages provoquent d’important dégâts dans le Nord-Ouest ; 28 mai 1992 : violents orages. Inondations en région parisienne et à Riom ; 30 mai 1999 : un violent orage s’abat sur Paris ; 31 mai 1998 : orages meurtriers sur la moitié sud… et bien d’autres encore, du même genre, et qu’on a bien vite oubliées au siècle de l’ordinateur … !

Domaine de Cruviers-Larnac route de St Ambroix 30700
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